Benoît Maire, Falke Pisano - Organon and the audience perception, The Snake

Organon and the audience perception,

Benoît Maire & Falke Pisano

The Snake - 20/10/2014 - 26/10/2014

 

Organon est une oeuvre que Falke Pisano et Benoît Maire ont réalisée en 2008 et exposée pour la première fois à la galerie Croy Nielsen.
Elle fait partie d’une série de collaborations entre les deux artistes et elle a été ensuite présentée en 2009 au Grazer Kunstverein de Graz (Autriche) avec le film The Wave également fruit de leur collaboration.
Cette oeuvre est une sculpture performative sur six tables à roulettes dont les éléments qui la compose peuvent être déplacés dans l’espace. Sur les tables une série d’objets abstraits se déploient.
Des textes accompagnent l’oeuvre, tel une description de l’acte même de la mise en place de la sculpture. Organon est donc montrée pour la première fois en France et pour cette occasion nous avons pensé à un lieu exceptionnel et unique dans son genre : The Snake.

The Snake est un lieu conçu par l’architecte François Roche en 2003 pour
répondre à une commande privée. Une habitation à la forme de serpent imaginée pour vivre avec des oeuvres d’art. Dans cet espace, de jour comme de nuit, on y retrouve la même lumière et la notion de temps est absente.

 

Falke Pisano
J’ai vu ton travail, Benoît, à une foire d’art où je présentais aussi des oeuvres en 2006. A l’époque, je travaillais comme assistante à la galerie  Ellen de Bruijne Projects à Amsterdam qui m’exposait et j’y étais encore conservatrice d’un petit programme en collaboration avec Charlotte Moth. Nous avons invité Benoît à exposer et nous avons commencé à correspondre. Deux ans plus tard, nous avons été invités par la galerie berlinoise Croy Nielsen à faire une oeuvre ensemble. Nous avons décidé de travailler sur place, de venir dans l’espace et d’y poursuivre les discussions que nous avions par email, de recueillir quelques matériaux et de voir ce qui allait se passer.

Benoit Maire
L’idée était d’avoir une sculpture continuellement au présent. Elle se compose de différents fragments sculpturaux sans cesse réagencés durant le temps de l’exposition par un performeur. Pour ce faire le performeur suit un texte, partition écrite avec Falke et imprimée sur des feuilles au format poster que l’on punaise dans l’espace de la galerie. Falke Pisano La sculpture était constituée de six tables roulantes de formes irrégulières qu’on pouvait déplacer dans l’espace ainsi que d’une collection de matériaux et d’objets disposés sur les tables. Nous avons travaillé sur la plupart des matériaux qui se trouvaient sur la table mais pas au point qu’ils en deviennent de véritables sculptures. Ils ont subsisté dans un état intermédiaire entre matériaux et gestes sculpturaux. Pendant l’installation, quand nous avons recueilli les matériaux, nous avons commencé à manipuler les objets disposés sur les tables l’un pour l’autre. Pendant que Benoît manipulait les objets, je notais des observations, des idées, des choses qui me venaient à l’esprit, après quoi nous échangions les rôles : je faisais ces manipulations et Benoît écrivait. Plus tard, nous avons réécrit le texte que nous avions ainsi généré et nous l’avons étoffé pour en faire un script.

Modérateur
Vous aviez des performeurs qui manipulaient les objets au cours de l’exposition ?

Falke Pisano
Quatre ou cinq fois par exposition. Nous n’avons jamais vraiment expliqué aux performeurs la relation entre le texte affiché sur le mur et les tables. C’était un élément que la personne devait développer pour elle-même.

Modérateur
De quoi parlait le texte ?

Benoit Maire
Le texte est une compilation des mouvements possibles de certains éléments sculpturaux, par exemple. Il s’agit vraiment d’un mélange d’indications très matérielles ou plus conceptuelles. Comme s’il s’agissait réellement d’une partition pour un usage possible de la sculpture.

Modérateur
Pourquoi le spectateur ne pourrait-il pas faire cela ? Pourquoi seul un performeur ?

Benoit Maire
Parce que vous avez besoin de pratiquer avec nous avant.

Falke Pisano
Nous avons choisi de travailler avec une seule personne par exposition, laquelle répète la recomposition de la sculpture tout au long de l’exposition et y consacre son temps et sa concentration. Nous n’avions pas l’intention que ce soit un jeu accessible à tous.

Public
Est-ce le texte qui est dans le livre ? Vous avez entre autre parlé d’une histoire qui devient une partition.

Falke Pisano
Nous avons considéré qu’il s’agissait d’une histoire combinée de la partition affichée au mur et des objets disposés sur la table dans l’espace. La table fonctionnait comme espace vide, nous avons pensé à un désert, où les objets étaient mis en mouvement. Ils devaient être placés d’une façon intentionnelle et générée par la partition.
Ce que j’ai aimé dans cette oeuvre, c’est qu’elle ne devient jamais un argument ou un récit fini, elle ne devient pas complète. Elle vibre beaucoup entre l’abstraction physique et l’abstraction mentale. Jamais elle ne pourrait se matérialiser dans une direction spécifique.

Modérateur
Est-il important qu’elle soit montée sur roues ?

Benoit Maire
Oui, car ainsi tout peut être déplacé. Nous l’avons montré dans un autre lieu,
au Grazer Kunstverein de Graz en Autriche, avec un film que nous avons fait ensemble The Wave.

Extrait d’un entretien entre Benoît Maire et Falke Pisano au sein du séminaire « Les Contemporains, littérature, arts visuels, théorie » qui a donné lieu à la publication Collaboratives Works, éditions Manucius, 2014.