Chantal Raguet - Projet NFF New French Fauvism

Chantal Raguet présente dans les deux salles de la galerie une série d'oeuvres hétéroclites. Sa pratique de l'assemblage, du décalage, de l'ornement, de la citation, lui permet de donner à l'ensemble l'impression d'une représentation baroque. L'espace-temps de l'exposition peut être envisagé lui-même comme un spectacle où chaque pièce serait à l'image d'un numéro qui demande, dans une pratique singulière, une virtuosité. En ce sens la notion d'atelier et de bricolage est contenue dans ces oeuvres qui toutes supposent un temps de réalisation important.
Le texte de cette exposition a été écrit par Chantal Raguet, à l'image d'une prise de position forte. Ainsi, elle utilise tout l'espace de la galerie, intervenant aussi sur la communication afin d'en maîtriser au mieux le récit. C'est pourquoi le Projet NFF est plus qu'une simple exposition.
Chantal Raguet vit et travaille à Bordeaux, après avoir fait une partie de ses études à l'Ecole des Beaux-Arts de Bordeaux.

« PROJET NFF  se présente comme un mouvement inédit. Il contient un ensemble de pièces qui lui sont reliées, de factures et techniques très diverses et réalisées entre 2003 et 2009.
Au tout début, j'ai été motivée par une incohérence relevée au fil d'histoires croisées. Les peintres fauves ont été désignés ainsi car rattachés par un emploi flamboyant voire outrageant de la couleur et pour leur capacité à contrarier l'instinct. Ils se sont principalement adonnés à la peinture de paysages et de portraits. Le soucis est qu'en réalité les fauves, ici animaux super-prédateurs, voient en noir et blanc. C'est dans le prolongement de la représentation du "paysage" et autour de la figure de célèbres dresseurs que j'articule l'ensemble du projet  NFF .
Ce qui me plaît dans le portrait du dresseur de fauves, c'est son potentiel d'incarnation d'héroïsme, son impact médiatique. A en faire pâlir les vieux rockers, tel une star du show, il existe par sa tournée (170 villes) et le bon déroulement de son numéro, unique au monde. Il entre dans la cage où sont mêlés tigres et lions pour les groupes mixtes, jusqu'à 20 fauves en simultané. Je pense que son show est construit autour de l'exposition et de l'exercice de sa domination sur l'indomptable et basé sur une forme répétitive de sa mise en péril (plus  de 720 représentations par an).
Il y aura eu les supplices des condamnés dévorés, les massacres et sacrifices de fauves dans l'Antiquité, les combats pour asseoir l'autorité des puissants, les ménageries princières, les chasses coloniales organisées, les arènes privées puis l'abolition des spectacles violents. Aujourd'hui, les maires de France tolèrent au coeur des villes, leur implantation provisoire, celle d'un nomadisme forcé. Leur présence souligne la juxtaposition de questions historiques, sociales, symboliques ou éthiques complexes évoluant sur fond de kitsch populaire, de danger et de succès.
J'aime l'idée d'une implantation autorisée car passagère et je souligne l'aspect décoratif et politiquement
correct de l'occupation du terrain par les machines, les hommes et les bêtes. J'ai établi des correspondances frappantes avec les bases et campements militaires, la nécessité d'emploi de stratégies d'adaptabilité et de défense, la constante présence du danger de mort. Il y a aussi des liens avec les toiles de tentes et les principes du camouflage. Ces éléments sont très importants dès lors que l'on aborde les notions de naturel et d'artificiel ou les notions de sauvagerie, d'instinct ou de culture ainsi que ce qui serait lié au paysage, au décor ou au panorama.»


Chantal Raguet


Cette exposition reçoit le soutien du CNAP et de la Drac  Aquitaine.